Dédales (français)

J'ai récemment revu Dédales et ai eu une bouffée de réminiscence de ma jeunesse, de mes débuts dans la vie avec L. et de ma découverte, avec elle, de la Meuse où je devais passer quelques années.

De notre vie faite de balades confinant à l'errance dans des villages misérables et des brocantes fauchées, de films en noir et blanc, de forêts profondes, de cimetières militaires et de tranchées.

Du sentiment de solitude, de vide, de désoeuvrement, qui me pesait. Comme passer à côté de la vie dans cette campagne morte, cette campagne assassinée, où rien n'arrivait et n'arriverait plus. Dont les habitants semblaient hagards et aussi esseulés, aussi aliénés, aussi impuissants que les citadins.

*

Hier soir, donc, j'ai revu Dédales.

Il y a une scène où un gendarme accompagne le psychiatre dans la visite de la ferme délabrée où a grandi le personnage de Claude. On les voit déambuler dans un réseau de vieilles caves aux murs de grosses pierres. Tout est sale, en désordre. Tout est vieux. Tout – les murs, les outils agricoles, les objets qui traînent – semble à l'abandon et en voie de décomposition.

Mais, je ne sais pas pourquoi, en une fraction de seconde, sans le verbaliser, j'ai imaginé qu'au lieu de découvrir des lieux parfaitement vides, ce psy et ce flic tombaient sur des squatteurs ; un croisement entre des ruraux irrascibles et des hippies contestataires des années 70 ; des hommes, des femmes, des enfants, vivant ensemble, nombreux, dans ce réseau de caves ; comme une sorte de village miniature, plein de vie et d'activité. Comme dans un refuge secret, clandestin, à l'écart du malheur des temps.

J'ai imaginé et j'ai souhaité la découverte inattendue et inespérée de la vie, et d'une communauté, là où comme partout aujourd'hui on ne peut s'attendre qu'à la solitude et la mort.